FOOD REVOLUTION - chapter #4

 
 

Pourquoi les cantines scolaires ne servent pas des repas Biologique ?

 

Les grandes villes européennes aiment faire parler de leurs solutions écologiques, des multiples nouveautés en agriculture raisonnée, des solutions agricoles urbaines, restaurants végans, restaurants qui commencent à enrichir les plats de la carte avec appellations « bio » mais les cantines scolaires ? On est où avec la base sociale de la restauration ?

Souvent, lors de mes réunions à la Direction de l’Education National de Monaco, j’ai posé la question : pourquoi on ne serve pas de repas biologiques dans les cantines de Monaco ? La réponse, comme je suis habitué à avoir ponctuellement, a été : pour la composition des not mets nous utilisons déjà 15% de produits biologiques et les parents des élèves ne veut pas payer un surplus que serait évident avec l’utilisation supplémentaire de produits biologique. Le raisonnement est toujours fait sur un pourcentage et non sur la santé et l’éducation alimentaire des élèves.

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Le passage au bio nécessite une démarche globale, on ne peut pas simplement substituer les aliments, il faut changer radicalement ses pratiques et la mentalité des acteurs impliquées à sauvegarder la santé des générations futures. Les matières premières ne représentent qu'un quart du ticket final. L’attitude de Monaco n’est pas trop loin de cela de la France car seuls 5% des établissements scolaires proposaient plus de 15% de produits bio à leur carte. Toutefois plusieurs communes de France ont décidé d'introduire des nouveaux critères de développement durable et de santé. Une grande majorité des Français serait favorable à l'introduction d'aliments bios, locaux et de saison en restauration collective publique. Selon un sondage IFOP pour l'association Agir pour l'environnement, 76% des sondés se disent favorables "au vote d'une loi imposant l'introduction d'aliments issus de l'agriculture biologique, locaux et de saison dans la restauration collective publique" : écoles, hôpitaux, maisons de retraite...

 

Toutefois la cantine 100% bio, écolo, (presque) sans déchet, où des élèves responsables mangent équilibré en choisissant leurs portions, existe déjà et pas trop loin de Monaco, juste à 55 km. On parle de la démarche de Mouans-Sartoux

 

Mouans-Sartoux 100% Biologique

Dans les cantines de Mouans-Sartoux les repas sont passés de 20 % bio en 2008 (1,90 € de coût aliments par repas), à 100 % bio en 2012 (1,86 € par repas) ; le prix moyen de participation pour les familles est de 3,13 €, ce qui n’est pas plus cher qu’ailleurs. Sauf que les élèves de Mouans-Sartoux mangent 100% bio toute l’année.

Déjà la réduction des déchets représente un gain de 20 centimes par plateau : 150.000 repas étant servis chaque année, c’est une économie de 30.000 € annuels qui a permis aussi de financer le tout-bio. La cantine scolaire génère 80% de déchets en moins qu’en 2010 : la moyenne française, Monaco inclus, en restauration collective, est de 150 g de déchets par assiette, à Mouans-Sartoux, 30 g.

Et puis, il y a la méthode qui donne à réfléchir : les menus sont établis chaque semaine en fonction de la maturité des légumes, locaux et de saison ; les enfants, responsabilisés, choisissent la taille des portions et peuvent se resservir à volonté ; les oranges et les pommes sont présentés en quartiers afin de limiter le gaspillage… Dans un premier temps, ils ont travaillé l’équilibre alimentaire dans le cadre du Plan National Nutrition Santé : plus de fruits, plus de légumes, moins de sel, moins de graisses. Pour respecter la santé des enfants et l’environnement ils sont allés plus loin, passant au bio. Ils ont commencé en 2008 à introduire des produits bio et en 4 ans ils sont réussis à passer à 100% de produits bio. Au-delà du bio, ils souhaitaient un approvisionnement de proximité, en limitant les transports, pour respecter le climat et l’aménagement du territoire.

 
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Au cœur du projet, il y a la sensibilisation des élèves à une alimentation de qualité. Education au goût, éducation à la responsabilité, éducation à l’environnement, éducation à la citoyenneté, éducation à la nutrition, à la santé. Un projet global ou les acteurs principaux, les enfants apprécient, sont sensibles et savent pourquoi ils mangent bio. Prises dans ce cercle vertueux, les familles se mettent aussi à changer leurs habitudes : 66% des parents d’élèves déclarent avoir changé leurs pratiques personnelles dans la famille, plus de bio, plus de produits locaux, plus de légumes, moins de sel, faisant  évoluer les pratiques de manière positive à domicile.

De fait, l’expérience Mouans-Sartoux montre la voie à suivre : une pensée globale (économique, sanitaire, agricole, éducative), une action locale concertée (enfance, éducation, espaces verts, agriculture, action sociale…), une avancée graduelle et rationnelle, une évolution progressive des mentalités, un accompagnement des enfants à travers des actions de sensibilisation et d’éducation…  Et Mouans-Sartoux n’est pas un cas isolé : plusieurs dizaines de collectivités se sont déjà mouvementées en faveur d’une restauration collective bio, locale, saine et juste.

Et les grandes villes européennes ils sont où in tout ça ? Pour l’instant les menus préparés par les majors prestataires pour les écoles primaires, sont loin d’être biologique, ne stimulent pas trop l’appétit et ils contiennent beaucoup de grasse animale. Toute fois ils essayent de se sauver avec l’appellation : « Du pain biologique est servi à tous les repas ».

 
 

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Gnocchis aux Petits Légumes de Printemps

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Pissaladière de Petits Pois et Févettes

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Comme reproduire ailleurs le projet Mouans-Sartoux

 

Le principe à la base n’est pas de caler le projet de Mouans-Sartoux à Monaco, Paris, Milan ou sur chaque ville européenne mais d’en comprendre l’essence et l’appliquer, en le personnalisant à son territoire. L’important est d’avoir un objectif clair : pour nous, respecter la santé des enfants et respecter l’environnement.

N’existe pas une limite de taille pour une ville qui voudrait mettre en place une restauration scolaire comme celle de Mouans-Sartoux, plusieurs villes ont des budgets plus importants et plus de personnels : il faut l'utiliser intelligemment. Pour le 100% bio, petite ou grande cuisine, c’est l’achat qui détermine et tout le monde peut décider. Pour le travail sur les déchets, sans atteindre le 30 g, si déjà ils diminuaient leurs déchets de 50% ce serait une première étape et là il y a beaucoup de pistes.

Pour atteindre toute ça il n’y a pas des écueils insurmontables, juste des obstacles à dépasser, pas de recette mais des solutions aux problèmes qui permettent d’avancer. Un objectif clair, une volonté de l’atteindre. Et surtout d'associer les équipes à la recherche des solutions et se rapprocher d’autres collectivités qui avancent pour échanger les idées et les pratiques.

En revanche les avantages ne sont pas négligeables. Manger et cultiver bio, c’est protéger et préserver l’environnement, c’est se donner les moyens d’être en forme et de dépenser moins. En mangeant mieux, on protège les terres en amont des nappes phréatiques, donc la ressource en eau et sa qualité. La France dépense beaucoup pour traiter l’eau du robinet dont la pollution est à plus de 50 % d’origine agricole. Ça représente une économie d’environ un milliard. Et les effets sur la santé en découlent : perturbateurs endocriniens, allergies en tous genres… Il ne s’agit pas de manger bio pour faire joli. Il faut s’interroger sur ce qu’on veut manger et en quoi ça peut profiter à toute une chaîne d’acteurs. C’est une question d’avenir de vie en société.

Gilles Pérole, délégué à l’enfance et à l’éducation de Mouans-Sartoux et Président de "Un plus bio".